Le festival d'Annecy aime prendre des paris audacieux, aller à contre courant et proposer des réalisations surprenantes pour le meilleur et parfois pour le pire. Seder-Masochism fait partie de la catégorie des ovnis cinématographiques tant sur la forme que sur le fond et l'on salue la prise de risque et l'audace ! 


Une histoire religieuse revisitée
Seder-Masochism est, comme son nom l'indique, une interprétation du repas traditionnel Seder de la Pâques juive Pessa'h, commémorant l'exode du peuple hébraïque d'Egypte, les 40 ans d’errance dans le désert puis l'arrivée sur "la terre promise". 

Le film reprend ainsi les différentes étapes du repas de Seder suivant l'ordre des quatre verres de vin rituels. Si le tradition est respectée en apparence, la mise en scène audacieuse propose bien des surprises. Nina Paley n'hésite en effet pas à mettre son grain de sel féministe dans cette histoire des patriarches (ou plutôt du  patriarcat) avec l'intervention de la déesse originelle à différentes étapes de l'intrigue (même si les anthropologues ont actuellement tendance à remettre en cause un culte à UNE déesse originelle, il n'en demeure pas moins que la majorité des figures retrouvées des époques les plus lointaines représentent des femmes aux caractères sexuels secondaires mis en avant, pour ceux qui ont oublié leurs cours de SVT, je parle des seins !!!). Mais revenons à nos moutons (sacrificiels), Nina distille son propos tout en conservant la trame officielle, grâce à sa mise en scène particulièrement audacieuse. 
 

Une animation de l'économie pleine d'humour

Nina Paley a réalisé Seder-masochisme seule ou presque. De ce fait, et comme pour le très réussi Have a Nice day, elle a du recourir à des économies de moyens en trouvant des solutions originales. L'animation est relativement économe, en particulier sur les différents avatars de la déesse originelle puisqu'il s'agit d'animer un squelette appliqué à des représentations de statuettes antiques, et cela fonctionne très bien. 
Le rythme est également donné par différentes phases narratives, que ce soit un Jésus de la Renaissance à la voix de speaker radio  américain des années 1950 énonçant les différentes phases de Seder, ou encore le dialogue entre Nina, la petite brebis rebelle sur l'autel de l’immolation en grande conversation avec la figure du très haut : son père, sur les traditions et la religion. 
Mais c'est surtout lors des épisodes de l'Exode où tous les dialogues 
sont ... des chansons plus ou moins célèbres qu'est donné un relief tout particulier à ce film. Les chansons sont particulièrement bien choisies et collent parfaitement aux propos de la réalisatrice, tout en soulignant une certaine absurdité des images. 

 

Seder-Masochism est un film qui ne plaira pas à tout le monde, en particulier ceux qui manquent de recul et les obscurantistes. A ce titre, il risque fort de ne jamais sortir en salle et l'on remercie le festival d'Annecy de nous l'avoir fait découvrir. Ce n'est pas réellement un film féministe, quoique, mais il discute les conventions et pousse à s'interroger soi-même sur les dogmes millénaires qui régissent les trois religions du livre. 

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